L'autonomie des producteurs et productrices face à l'État et aux banques

L’Autonomie agricole selon LibertAmap
LibertAmap est un projet agricole dont le but est politique (dans le sens de « qui concerne les citoyen·nes ») : développer une autonomie agricole dégagée de l’industrie agroalimentaire et des choix politiques de l’État.
Le collectif permet et bénéficie d’une pratique agricole biologique et locale, à taille humaine. L’autonomie ne s’acquiert pas seul·e, et repose sur l’entraide entre l’agricultrice·teur et les amapien·nes. Ces dernier·es sont pleinement actrices et acteurs d’un système de production alternatif à celui de la grande distribution.

Autonomie alimentaire
Le lien entre l’agricultrice·teur et les amapien·nes permet de connaître l’origine des légumes et de sortir du système capitaliste de l’agroalimentaire (productivisme, distribution en supermarchés, exploitation du personnel, alimentation pauvre en goût et en nutriments mais riche en pesticides).

Autonomie dans les méthodes de culture
Choisir ses méthodes de culture, c’est un choix politique. Les légumes sont produits le plus indépendamment possible vis-à-vis des semenciers industriels, des banques, des organismes de subventions de l’État. Mais l’autonomie reste relative, puisque le maraîcher ou la maraîchère reste tributaire de la MSA (Mutualité Sociale Agricole), une obligation légale.

Autonomie sur les principes de l’agriculture biologique
L’agriculture est forcément biologique. C’est le mode de production intensif qui devrait être qualifiée d’agriculture industrielle. L’agriculture à LibertAmap est sans intrants de synthèse, avec des cultures variées et de saison sur un sol vivant, sur une petite surface qui respecte les équilibres agroécosystémiques et les êtres humains.
La certification AB est coûteuse, et sa charte est peu exigeante, ne prenant pas en compte le type de travail du sol, ni l’éthique des conditions de travail. C’est pourquoi le maraîchage à LibertAmap n’est pas certifié.

Autonomie en ressources locales
Le maraîchage nécessite l’utilisation de terreau (qui est souvent issu de tourbières dévastées dans les pays de l’Est et au Canada), de fumier (de cheval), de graines et de plants de légumes. Contrairement au fumier, il n’est pas simple de trouver du terreau dans la région. Un point d’approvisionnement local en terreau issu de sources durables est nécessaire ainsi que l’implantation d’un spécialiste en plants et semis (ou de mutualisation des plants) pour permettre de limiter les transports. La récolte des semences pour l’année suivante et les échanges avec d’autres productrices·teurs locaux se mettent en place à Besançon.

Trouver des terres agricoles en milieu périurbain à un prix décent, les allouer à de jeunes productrices et producteurs (cf l’activité de Terre de Lien et des pépinières d’entreprises agricoles), permet d’avoir une grande diversité alimentaire, d’aider les plus jeunes et potentiellement de nourrir localement une population étendue.

Autonomie sociale
Elle s’acquiert grâce à l’interdépendance entre l’agricultrice·teur et l’amapien·ne. Dans la majorité des exploitations agricoles, la production s’effectue à plusieurs (gaec), et aux moments intenses de l’année, on fait appel à la famille, à des salariés, ou plus souvent à des stagiaires. Au sein de LibertAmap, pour soutenir l’agricultrice·teur, les amapien·nes participent pour les semis, les plantations, le désherbage, la récolte, et bien sûr, la distribution.
Pour concevoir et créer des outils, les amapien·nes sont aussi une source importante de techniques et de connaissances. Par exemple : l’arrivée ou la conservation d’eau dans les champs, installation d’électricité (non-nucléaire), toilettes sèches, cabane de jardinier, outils spécialisés (brouette maraîchère), etc. Toutes les idées sont bienvenues.
Le collectif est une source de rencontres pour faire émerger ou partager des projets avec d’autres collectifs, comme des épiceries solidaires (T’as meilleur temps), des réseaux  d’achats groupés (La péniche Remise à flots) ou des produits locaux éthiques, etc.

Autonomie financière
Le contrat assure à l’agricultrice·teur l’écoulement de sa production dès la récolte. En revanche, les semences et les plants ont un coût et par conséquent le producteur a besoin d’un apport financier avant la saison des semis. L’ensemble de la production est répartie ensuite aux amapien·nes. Ces dernier·es prennent en charge la pérennité de la distibution en trouvant chaque année un nombre d’adhérent·es suffisant pour assurer à l’agricultrice·teur un revenu décent. La rémunération de l’agricultrice·teur est cependant faible par rapport au temps de travail. Il faudrait trouver comment l’améliorer pour lui permettre d’en vivre correctement.

Pour conclure…
Dans le collectif LibertAmap, l’autonomie passe par la solidarité entre l’agricultrice·teur et les amapien·nes, et elle est multiple :
- une solidarité financière avec les paniers ;
- un soutien physique lors des chantiers et autres actions ;
- l’échange ou le don technique de compétences.
L’autonomie en partie acquise au sein de LibertAmap demande à être développée dans d’autres domaines comme la santé, l’éducation, afin de réfléchir et d’expérimenter d’autres modèles de société.

LibertAmap est née de la volonté de s’entraider pour construire des structures qui nous permettront à toutes et à tous d’avoir d’autres rapports entre nous et avec la terre, de dépasser le cloisonnement entre ville et campagne ; et de se poser la question : que fait-on ensemble ?… Car « quand la solidarité n’est plus nécessaire, on achète pour se passer de l’autre » et c’est bien triste.



Texte révisé collectivement et issu du débat sur « l’autonomie d’un producteur face à l’État et aux banques » présenté par Edouard Lolli (premier maraîcher de LibertAmap).